le deuil
en quatre
temps

Aujourd’hui, vous faites face à la perte d’un proche ou d’une personne qui était importante et peut-être aussi fondamentale dans votre vie. C’est un tournant douloureux et décisif. Cette épreuve vous déstabilise et provoque beaucoup de chagrin et même un certain désarroi. Même si cela peut paraître étonnant, il se peut aussi que vous viviez la perte avec sérénité. Il est difficile de prévoir ses réactions au deuil, et cela même quand la mort s’avérait probable à la suite d’une maladie incurable

Le temps
d’assimiler

Recevoir la nouvelle soudaine de la mort d’un proche ou assister à son dernier souffle peut être vécu comme un choc, un cauchemar, ou une expérience surréelle à laquelle on tente soi-même de survivre, soit en restant stoïque, soit en exprimant sur-lechamp la détresse qu’engendre sa perte.

La stupéfaction et le refus de la cruelle réalité se confondent avec d’autres réactions comme le grand chagrin, la déstabilisation, l’irritabilité, les regrets, ou encore le sentiment de culpabilité qui, au fil du temps, diminuera en intensité grâce au soutien que procure un entourage affectueux et compréhensif ou grâce à des ressources personnelles insoupçonnées et qui émergent au moment de vivre un deuil.

Dire, écrire, dessiner, méditer, lire, partager ses sentiments, ses craintes avec ses proches, avec d’autres personnes en deuil, ou avec un professionnel de la santé figurent parmi les moyens essentiels pour colmater la brèche, pour avancer à son rythme, pour déployer sa capacité de composer avec le deuil afin d’intérioriser le lien et, ainsi, de compenser la permanence de l’absence.

Le temps
de traverser

Le deuil frappe – psychiquement (douleur morale), physiquement (maux de tête, maux de dos, ou autres malaises), cognitivement (mémoire et concentration altérées), socialement (faire face à nouveau à un monde privé de l’autre) et spirituellement (quête incessante de sens) – tour à tour et dans un va-etvient répétitif à l’intérieur d’une période dont la durée est variable. La grande fatigue qui en découle ralentit les activités habituelles, altère l’attention et la vigilance de la personne bouleversée. Parfois, et pour un certain temps, les symptômes que soulève le deuil s’apparentent à ceux que l’on attribue à la dépression comme, par exemple, les crises de larmes, les troubles du sommeil et de l’appétit, l’absence de joie ou de motivation. La personne en deuil peut éprouver de telles manifestations au cours des premiers mois sans nécessairement craindre que sonétat ne se détériore pour autant. Il est normal d’être ébranlé par le deuil.

Selon la littérature et l’observation clinique, au sixième mois, la personne en deuil peut même avoir l’impression de perdre du terrain, de rechuter; la courbe descendante annonce toutefois une remontée, parfois lente, mais elle précède une poussée vers l’apaisement. Si les symptômes perdurent de façon intense après les six premiers mois, une consultation psychologique permettra d’évaluer la situation et de réduire le risque d’aggraver son équilibre. Par ailleurs, dans plusieurs cas, une consultation précoce peut s’avérer bénéfique ou préventive. Il en est de même pour un avis médical qui peut aussi rassurer sur les symptômes physiques qui, avant le deuil, nous étaient étrangers.

Le temps
de s’adapter

La durée d’un deuil varie selon la personnalité, la façon de s’attacher et de se détacher, le rapport à la perte et aux changements qu’impose la vie. La première année est généralement marquée d’émotions poignantes à cause des souvenirs que suscitent une date, une saison, une activité vécue avec la personne qui n’est plus. Le premier Noël, le jour de l’An, Pâques, les anniversaires, le son d’une musique, le partage d’un repas, un éclat de rire, tout devient un rappel de la « vie d’avant », de ce qui n’est plus.

Apprivoiser l’inconnu, développer de nouvelles habitudes, confronter sa solitude, bref, vivre autrement constitue un défi de taille. La confiance, l’espérance et la détermination sont des atouts indispensables pour assurer ses pas et traverser le chemin du deuil. C’est un travail de moine, un travail de tous les jours, un travail dont les résultats diffèrent pour chacun et ce, jusqu’à ce que les forces du moi puissent à nouveau émerger, et même nous transformer. Au début, la personne en deuil est centrée sur sa perte et sur sa propre souffrance alors que son entourage souffre aussi de l’absence d’une personne qui « appartenait » à un groupe, à une famille, à des amis, ou à un milieu de travail.

Graduellement, l’endeuillé pourra affermir ou accroître son empathie envers ceux et celles qui sont également frappés par l’épreuve. Le deuil nous rapproche les uns les autres même s’il nous a d’abord isolés.

Le temps
de se
reconstruire

La personne en deuil cherche d’abord à « rejoindre le disparu », à le maintenir vivant à travers elle. Pendant des semaines ou des mois elle cherche à rétablir le contact, le temps de réintégrer le lien qui a existé et sur lequel elle peut encore, quoique différemment, s’appuyer. Après la perte et après avoir vécu les épisodes intenses des premiers temps du deuil, la vie ne pourra jamais redevenir comme avant. La personne en deuil doit « se remettre au monde » d’une autre façon, repenser sa vie, l’amour, la perte et la mort. Alors seulement la quête de sens prendra un nouveau visage, une nouvelle direction dans un espace inconnu mais beaucoup moins anxiogène.

Le deuil ouvre un chemin que la vie sans épreuves ne connaît pas. L’ombre fait place à la lumière, la peur du vide s’atténue et de nouvelles possibilités ouvrent une voie jusque-là impensable. L’endeuillé trouve en lui une vitalité qu’il croyait avoir perdue en perdant l’autre, il se redécouvre différent au terme non pas du deuil mais d’un travail continue dont le dénouement sera libérateur et prometteur.